Quand plus rien ne va…
Aujourd’hui je voulais vous parler de la vie, et de ces moments difficiles. Ceux qui nous font mal, et pour lesquels on se fait du mal.
Je parle de ces blessures qui nous poussent dans des zones d’ombre. Là où on sent seul. Et minuscule. Mais cette souffrance est tellement grande, qu’on préfère l’expulser plutôt que la supporter. Comment ? La nourriture, entre autres formes d’expression.
Quand la vie me fait mal, je me fais mal. En mangeant outre mesure. Ou en refusant de donner l’élément vital à mon corps : la nourriture, qui permet de faire fonctionner mes cellules, mes organes et mes muscles, bref moi toute entière. Par la compulsion ou la restriction, j’agis et extériorise une partie de cette souffrance.
Et je crois que ça me fait du bien, et que ça m’aide à traverser ces angoisses. Parce que seule, face à ce monstre de mal-être, je suis tétanisée. Alors vite, pour ne pas me faire engloutir, je dévore à tort et à travers, espérant qu’avec ce gavage j’apaiserai la bête. Je noie ma souffrance sans fin ni faim.
Et l’action, si terrible soit-elle pour moi, me permet de regarder ailleurs l’espace d’un instant. De ne plus faire face aux monstres de souffrance. En regardant les innombrables paquets de biscuits engloutis ou la cuvette des toilettes, je joue à cache cache avec les ombres terrifiantes. Et je déplace ainsi mon attention sur autre chose, sur quelque chose dont je suis l’auteure.
Par un savant glissement, j’ai transformé l’angoisse et la souffrance de la vie en mes angoisses et mes souffrances. Car, somme toute, il est plus facile de faire face à une crise de boulimie qu’à un vide existentiel.
Là a été mon erreur pendant de longues années.
Malheureuse et déséquilibrée, j’ai trouvé les troubles du comportement alimentaire pour m’aider, comme une béquille, à surmonter des épreuves. Oui, j’ai bien parlé d’aide, alors que ces comportements sont autodestructeurs. Et qu’ils m’ont emmenés bien plus loin que je l’aurais imaginé. Trop loin. Mais je crois bien que c’était la seul outil dont je disposais à ce moment-là.
Peut-être que toi aussi tu trompes ta souffrance en la remplaçant par une autre souffrance, plus facile à gérer puisque tu crois la contrôler. Le souci, c’est que les troubles du comportement alimentaire sont dangereux et incontrôlables. Et qu’ils ne résolvent pas le fond du problème. Je ne dis pas que chaque personne atteinte de TCA a forcément des soucis existentiels et des blessures profondes de l’âme. On peut tout à fait développer une anorexie/boulimie/hyperphagie sans être traumatisé de la vie.
En revanche, les TCA ne sont pas la réponse adéquate aux malaises profonds. Même s’ils te semblent bons aujourd’hui, ils ne sont pas la solution pour faire face au monstre.
Mais peut-être aussi qu’aujourd’hui tu n’as pas d’autres outils à ta disposition pour résoudre le vrai problème pour de bon. Et que tes troubles alimentaires sont là pour combler ce manque de moyens.
Dans tous les cas, cela ne sert à rien de s’enfoncer encore plus en se culpabilisant de faire des crises ou d’être sujet aux TCA. « Simplement », sois-en conscient(e). Les troubles du comportement alimentaire font peut-être partie de ta vie pour détourner ton attention de maux sombres et gigantesques. Tu ne pourras pas passer ta vie à vivre de TCA, de crises, de purges. Il va falloir faire quelque chose de ce placard noir et terrifiant dans lequel angoisse et souffrance logent.
Faire quelque chose de ce placard ne signifie pas forcément l’ouvrir.
Tu n’es pas obligé(e) d’aller là où tu es terrifié(e).
Tu peux aussi décider de fermer cette porte et de ne plus jamais l’ouvrir. Il n’y a malheureusement pas de solution à tout. Mais avec le temps, vivre avec ces ombres devient de plus en plus facile. Elles sont toujours là, mais peu à peu on les oublie.
Je n’ai jamais trouvé de solution à mon mal-être existentiel qui me dévorait. Alors je l’ai juste contenu dans une pièce, et je l’ai verrouillée. J’ai choisi de ne plus me rendre devant cette porte angoissante. Car je savais ce qu’elle renfermait et je n’avais plus envie que cela fasse partie de ma vie . Ce n’est pas du déni. Ni de la survie. C’est simplement de la logique, et un peu de bienveillance.
Alors si toi aussi tu te sens perdu(e), et que tu combles ta souffrance par des comportements alimentaires malsains, essaie de prendre conscience qu’il existe d’autres outils pour faire face à l’angoisse. Et que ta souffrance, aussi légitime qu’elle soit, peut ne pas avoir de solution. Cela ne veut pas dire que tu dois baisser les bras et te désespérer de ça. Mais des fois, dans la vie, il n’y a pas de remède à tout. Il faut malgré tout l’accepter et faire le deuil d’un certain nombre de choses. Pour avancer.
Sache en tout cas que tu n’es pas seul(e), et que je suis passée par là, tout comme de nombreuses personnes. Parler pourra te soulager, aussi je t’encourage à t’ouvrir, auprès de tes proches, ou de moi. Je saurai t’écouter sans te juger, et t’aider dans ces moments difficiles. N’hésite pas à m’écrire sur ce blog ou sur mon instagram @manger.simplement (https://www.instagram.com/manger.simplement/?hl=fr.).
Ne désespère pas, tu vas t’en sortir car tu as une force en toi dont tu n’as pas encore conscience.
Prends soin de toi,
M.