Le heathy-eating et ses dérives

Lorsque je me suis intéressée de plus près à ce que je mettais dans mon assiette, je suis rapidement venue à surfer sur des pages de « healthy eating » et de nourriture saine. Puisque ce qu’on met dans notre corps est important, alors oui, il semblerait que choisir les meilleures options possibles soit une évidence. Et pourtant …

 » Tu es ce que tu manges » : ce slogan m’a profondément marqué lorsque je l’ai lu pour la première fois. C’est pas si bête : dans la mesure où tout ce que l’on mange se transforme en énergie et en cellules, en peau, en cheveux, on est bien ce que l’on mange.

C’est pourquoi j’ai décidé de vider tous mes placards et de repartir à nouveau sur une base saine. Pour manger sain, il faut :

  1. du bio
  2. du local
  3. du non industriel
  4. du sans gluten
  5. du sans sucre
  6. du sans sel
  7. du sans café ni thé
  8. du sans huile de palme et mauvaises graisses
  9. du végane
  10. du cru
  11. des aliments qui ne fermentent pas

Bref, la liste est longue. A cela on ajoute le fait que l’eau du robinet est polluée, mais que l’eau en bouteilles est pire. Que les vitamines des fruits se perdent dans le blender etc, etc. Il faudrait donc, pour manger healthy, investir dans :

  1. un vitaliseur
  2. un déshydrateur
  3. un extracteur de jus
  4. un germoir

Et ainsi de suite.

Mais j’étais convaincue, alors j’ai tout changé dans ma façon de cuisiner et de consommer. J’ai passé trois fois plus de temps à préparer mes repas, et j’ai commencé à emmener mes tupperware partout avec moi. Comme je ne voulais pas manger ce dont je ne connaissais pas l’origine, je préférais encore porter ma propre cuisine. Mon sac à main s’est transformé en sac à dos. Et les soirées entre amis, des soirées tupperware.

J’ai peu à peu eu peur de tout. Je passais mon temps à regarder des vidéos de gens « sains » (crudivores et compagnie), nourrissant mon angoisse d’être contaminée par je ne sais quelle cuisson, aliment ou comportement.

Petit à petit, ma vie s’est enfermée dans ce « healthy lifestyle » pas du tout healthy : je sortais moins avec mes proches, je passais mes journées à penser à la nourriture et à toutes les menaces qui m’entouraient si je ne faisais pas attention. Manger sain s’est trop rapidement transformé en manger moins. Je m’étais créée une dictature avec des règles hyper rigides qui me bridaient et m’empêchaient de vivre. Mon moral s’est envolé avec mes traditionnels petits pains au lait à la pâte à tartiner du goûter.

En parallèle de toutes ces nouvelles habitudes, j’ai commencé à avoir FAIM. Genre, vraiment très faim. Comme je m’interdisais la totalité de ce qui me faisait envie, je n’étais pas super épanouie. J’ai eu des moments où j’aurais pu manger une maison entière. Mais comme mes placards étaient vides, je me jetais sur le beurre de cacahuète et les tartines sans gluten (bien que je n’ai jamais été intolérante). Je cherchais à compenser les privations quotidiennes, mais je ne le savais pas encore.

Je pensais que c’était moi le problème, sans me rendre compte que toute cette obsession « sain et healthy » me tyrannisait.

Pourtant cela me semble évident maintenant : si je me jetais sur de la nourriture riche en énergie (et bien grasse et salée comme le beurre de cacahuète), c’est parce que je ne mangeais pas assez, et surtout que je n’étais pas satisfaite par ce mode de vie.

Non, les jus de céleri à la coriandre ne me rendaient pas heureuse. Même si j’en buvais jusqu’à ne plus avoir faim, mon corps réclamait toujours de la nourriture qui lui fasse envie et plaisir.

J’ai pris du recul sur ce mode de vie lorsque épuisée par mes crises de boulimie, j’ai décidé de ré-ouvrir mon alimentation. Malgré la peur de la nourriture que je m’étais créée. Et cela m’a fait le plus grand bien.

« Tu es ce que tu manges » est bien trop facile à dire. Car si on y réfléchit à deux fois, on ne tombe plus dans le panneau. « Tu es ce que tu manges… mais tu es aussi ce que tu vis ». Et en arrêtant de manger, je m’interdisais de vivre. Et puis croyez-moi, votre valeur en tant que personne sur cette terre ne sera jamais déterminée par le fait que vous ayez mangé trois spéculoos industriels avec votre thé.

Prenez soin de vous,

M.