Sommes-nous addicts à la nourriture ?

Quand je revois mes comportements alimentaires durant la période où j’étais complètement perdue, j’étais comme une vraie junkie. Il me fallait mes shoots de nourriture. Je ne pouvais pas y résister. Il me fallait toujours plus de gâteaux, plus de crises. Et si ne cédais pas à cette urgence, c’était comme si le monde s’arrêtait. Peut-on parler d’addiction à la nourriture ?

  • Vous arrive-til d’avoir des envies incontrôlables de manger ?
  • Ressentez-vous un grand soulagement durant la période de prise alimentaire, malgré une évidente perte de contrôle ?
  • Mangez-vous davantage en quantité que ce que vous aviez fixé ?
  • Continuez-vous à manger en dépit de votre poids et des effets pour votre santé ?
  • Redoutez-vous les repas en compagnie, parce que vous ne savez pas si vous allez vous « tenir » ?

A toutes ces questions, je répondais un grand OUI il y a quelques années. Manger était devenu un cauchemar pour moi, et je passais mes journées à élaborer des stratégies complexes pour perdre le maximum de poids en un minimum de temps. Mais voilà que ça ne fonctionnait évidemment pas, mais que pire encore, j’avais des envies immodérées de faire des repas gargantuesques.

Et au plus je m’empêchais de manger, au plus je dévalisais les placards. Au plus je m’interdisais de manger des féculents, au plus le pain me faisait envie.

J’ai commencé à me dire que j’avais un sérieux problème lorsque j’ai réalisé que la voix dans ma tête qui me hurlait dessus pour que je vide ce paquet de biscuits n’avait aucune limite. Que je cède ou que je résiste, les effets semblaient tous me conduire dans un état de manque, semblable à celui que les accros à la drogue décrivent.

Le verdict était tombé : j’étais dépendante de la nourriture.

Mais est-ce réellement le cas ? Pouvons-nous tomber dans l’addiction alimentaire comme on tomberait dans l’addiction à une drogue dure ?

J’ai longtemps cru que oui, que j’étais la junkie du chocolat. Mais en cherchant mieux dans les neurosciences et le rôle du cerveau dans les crises de boulimie, je me suis rendue compte que ce n’était pas tout à fait exact. Il y aurait effectivement une dépendance. mais elle n’est pas où on l’attend, c’est-à-dire sur l’objet de convoitise, le chocolat en l’occurrence. Non, la dépendance serait plutôt dans les schémas de fonctionnement que dans la nature de ce que l’on mange.

Nous ne sommes pas accro à la nourriture, nous sommes plutôt dépendants à certains comportements parce qu’ils provoquent en nous un effet positif semblable au shoot d’une drogue.

Si je me ruais sur le beurre de cacahuète, ce n’est pas parce que j’étais addict au beurre de cacahuète. C’est parce que je savais que le beurre de cacahuète est vraiment agréable, et que j’avais mémorisé quelque part dans mes souvenirs, que manger cet aliment me faisait du bien. Aussi, je me précipitais sur le pot pour engloutir des cuillères, mue par une pulsion d’action.

L’addiction serait ainsi le résultat de nos habitudes et de nos souvenirs, et nous serions poussés par une quête du plaisir (point commun de toutes les drogues). Manger étant beaucoup plus simple que trouver de l’héroïne, nous nous jetons sur la nourriture qui nous apporte le plus de satisfaction.

Eh oui, on se rue sur le (très) gras, le (très) sucré et le (très) salé, parce qu’ils stimulent directement ce centre du plaisir que l’on a dans le cerveau. Ne vous étonnez pas si vous n’avez jamais eu une frénésie de brocolis ou de salade verte sans sauce, c’est normal ! Si vous vous dirigez toujours vers les chips, la pâte à tartiner et les croissants, c’est parce que votre cerveau sait que ce sont eux qui vous apporteront le plus de réconfort.

Et au plus vous allez activer ce schéma de stimulus-action (qu’on pourrait appeler le « chips-manger »), au plus votre cerveau saura où se trouvent les aliments plaisir.

Cela veut-il dire que l’on soit condamnés à ne jamais manger de pizza sous peine de devenir drogués ?

Loin de là, car tous ces schémas de pensée viennent de plus loin encore, et notre « dépendance » alimentaire a bien une origine première. C’est pour cela qu’il existe des mangeurs « normaux » capables de s’arrêter à la troisième part de pizza : ils n’ont pas activé le processus responsable de l’addiction. Et c’est aussi pour cela qu’il existe des personnes comme moi il y a quelques années, incapables de commander la moindre pizza, par peur de ne plus jamais m’arrêter, parce que j’avais déjà mis en place des fonctionnements dans mon cerveau.

Je vous parlerai de ces fonctionnements et processus responsables de l’addiction dans un prochain article, je vous laisse méditer sur ces passionnantes découvertes de notre cerveau.

Prenez-soin de vous,

M.